Sadek Bouyahia, plus connu sous le nom de Sadek El Bédjaoui est né le 17/12/1907 au quartier de Bab Ellouz (Bédjaia). Il tire son enseignement littéraire et religieux à travers l’école coranique de Sidi El Betrouni, dont les enseignants étaient : Cheikh Larbi Makhchich, Cheikh Belabbas et Cheikh El Hadi Zerrouki, en parallèle avec son enseignement à l’école primaire. Son initiation musicale se fait sentir en 1928 grâce à ses maîtres Cheikh Mahmoud Ahaddad ou Belheddad,Boualem Bouzouzou, Si El Hachemi et Si Aâllaoua Mahindad (Ces maitres étaient en possession de « KNANES »d’El-Aalami, Ben Msayeb, Ben-Triqui Ezzengli et des Genres musicaux pratiqués à Bejaia), qui lui ont enseigné principalement quelques morceaux dans le chant Madih, Melhoun, Hawzi,Aaroubi et des Nqlabate…mais c’est à Alger que le maître ait pris possession de la « nouba », d’ailleurs, on dit que c’est grâce à lui que cette dernière s’est retrouvée à Bédjaia…Cheikh Sadek Bédjaoui, dont la voix n’est plus à présenter, demeure l’un des facteurs communs que partagent Tlemcen et Bédjaia…
Ses talents d’artiste furent découverts par le mandoliniste Marcel Lebratti (connu sous le nom Sassi Brati) et le pianiste Moïs Ammar, venus animer une soirée familiale à Bédjaia. Sadek Bédjaoui fut encouragé et incité à les rejoindre à Alger pour renforcer son apprentissage et son répertoire. Avant son départ pour Alger en 1932, Sadek Bédjaoui jouait déjà de la guitare et de la kouitra. Il côtoya ainsi Laho Serour et Mkhilef Bouchaâra et principalement Cheikh Mahieddine Lekhal, et rejoint alors l’association El Mossilia en 1933, et devient très proche de Cheikh Lekhal au point de l’accompagner à Blida chaque dimanche quand il se déplaçait afin de dispenser des cours à l’association El Widadia, qui comptait comme élèves, à l’époque, Cheikhs : Dahmane et Larbi Benachour, Hadj Medjbeur, Hadj El Mahfoud, Mohamed Benguergoura. Med El Mahdi dit Quezzouh…
En 1934, lors d’un Séjours à Tlemcen, Sadek Bédjaoui rencontra Cheikh Larbi BenSari et sa carrière prend alors une autre saveur puisque fut pour lui l’occasion de s’acquérir d’un répertoire Hawzi plus dense, mais aussi d’adopter un coup d’archet spécial, inspiré par celui de Cheikh Larbi au violon alto. A Tlemcen, il côtoya également Cheikh Omar Bekhchi et son élève Abdelkrim Dali. À Oran, il fit connaissance avec Saoud l’Oranais dans son café, et au même endroit, Maâllem Zouzou Guennoune, et Ibiho Bensaïd, qui a également influencé la personnalité musicale de Sadek Bédjaoui.
En 1936, il rentra à Bédjaia, doté d’un certain bagage musical, et beaucoup de volonté à faire épanouir la vie culturelle et musicale à Bédjaia. Il devint directeur de Radio Bédjaia en 1942 et crée alors plusieurs associations : « Ennadi » en 1945, « Chabab El Fenni » en 1947, « Chabiba » et « El Inchirah »…qui furent dissoutes par l’administration coloniale, à part « Chabab El Fenni », qui participa en 1938 au Festival à Fès, où il fut décoré par le Sultan du Maroc, pour lui fut l’occasion de rencontrer certains maîtres marocains tels : El Brihi et son élève Abdelkrim Raïs,ainsi que Moulay Ahmed Loukili.
Dès 1948, il fut animateur et Chef d’Orchestre de la Radio Bougie et ce jusqu’en 1954 (déclenchement de notre révolution).
En mai 1949, lors du Festival de Musique Arabo-Andalouse en Tunisie, il fut décoré par le Bey de Tunis du « Nichan El Iftikhar ».
Après l’indépendance, il dirigea « l’Orchestre du Conservatoire de Bédjaia », qu’il a créé le 26 mars 1963, et ce jusqu’à 1986. Il eut comme principaux élèves : Youcef Abdjaoui, Abdelwahab Abdjawi, El Ghazi, Djamel Allam, Mohamed Raïs, M’hamed Rédouane, Kamel Stambouli, M’hemed Schbaiyem…Il a laissé plusieurs nouba enregistrées à Radio Alger, ainsi que quelques Nqlabate, Nsrafate, et Qsayed dans le Hawzi et le R’hawi.
Après la mort de Cheikh Sadek le 07 janvier 1995, l’orchestre du conservatoire municipal de Bédjaia prit le nom de Ahbab Cheikh Sadek El Bédjaoui.
Si Cheikh Sadek Bédjaoui est un brillant interprète doté d’une voix puissante et mélodieuse, il est aussi un compositeur et parolier, il a laissé plusieurs poésies dans les différents dérivés de la musique andalouse; de son corpus, on peut citer :
- Dans le Djed : Ya Smaâ Leklam, Sellou Aâla Ennabi Sid Lessiyed, Medh Sidi Essoufi, Medh Sidi M’hemed Mokrane…
- Dans le Hezl : El Hawa Ouel Houb, Win Ahli Win, Ya Qed El Mesrar, Mehla Del Aâchiya…
- Autres : Wahrane, Ana Dziri, Ksentina Tewsel Ya Hmem, Hada El Aâm, Ya Qelbi Esmaâ, Ya Elli T’hab Temlek, Ah Ya Khti, Tlemcen Ya El Bahia (Dialogue entre les deux cités séculaires Tlemcen et Bédjaia…)
Egalement, il a consacré un poème d’éloge funèbre (Rethwa ou Ritha) à son ami Cheikh Omar Bekhchi qu’il a connu dans les années 30 à Tlemcen au domicile de Cheikh Larbi Bensari, au faubourg d’El Qalaâ. Ce poème traite de l’inéluctabilité de la mort, soulignant le caractère éphémère de la richesse et de la puissance, évoquant parfois l’au-delà, et les joies ou les tourments qui y attendent l’homme le jour il comparaîtra devant le Très-Haut.
- En voici quelques « biyets » traduites : Commémoration de cheikh Omar El Bekhchi
Je commence mes propos en invoquant le nom du Miséricordieux
l'Unique, le Très Haut
Pardonne-nous, o bienveillant !
Par le prestige d'Ahmed, seigneur des justes.
Ô vous qui êtes présents, o visiteurs !
C'est la commémoration de Cheikh Omar!
Où est notre père El Hadj
El Aârbi Bensari le lumineux
Et Boudhelfa, porteur de diadèmes
Et Maqchiche, tous grands maîtres en poésie
O vous qui êtes présents, ô visiteurs !
C'est la commémoration de Cheikh Omar !
Où est mon ami Omar ?
El Bakhchi maître de tous les instruments à cordes
Et Dali, vivificateur des fleurs
Que Dieu leur épargne l'Enfer !
Ô vous qui êtes présents, ô visiteurs !
C'est la commémoration de Cheikh Omar !
Manuscrit de Cheikh Sadek Bédjaoui : Qsentina Tewsel Ya Hmam (composition)